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quarta-feira, 16 de fevereiro de 2005

 

Foto de Loic Peoch

"Tu te dis : je m'en irai
Vers d'autres paysages, d'autres rivages exaltants,
Vers une ville beaucoup plus belle
Que celle-ci ne le fut ou n'a jamais souhaité d'être
Cette ville où chaque pas ne fait que resserrer davantage
Le noeud coulant : coeur enseveli dans la tombe d'un corps,
Coeur inutile, épuisé, combien de temps encore
Faudra-t-il demeurer confiné entre les murs de ces
Effroyables ruelles d'un esprit trop banal ?
De quel côté que je tourne le regard
Je ne vois se dresser que les ruines sombres de ma vie.
J'ai vécu kà tant d'années, dépensé, gaspillé
Tant d'années, en pure perte.
Il n'est pas de nouveau paysage, mon ami, non,
Pas de nouveau visage ; car la ville te suivra
Et dans les mêmes rues tu erreras sans fin ;
Les mêmes banlieues de l'esprit croupissent de l'enfance à la vieillesse,
Et c'est dans la même maison qu'à la fin
Tu perdras tes dents et tes cheveux.
La ville est une cage.
Nul autre lieu que celui-ci, à jamais
Ton port de ce côté-ci de la vie, et il n'existe pas de navire
Pour t'emporter hors de toi-même. Ah! tu ne vois donc pas
Que tu as ruiné ta vie dans ce lieu de misère,
Et qu'elle ne vaut plus rien maintenant,
Où que tu ailles, par toute la terre ?"

Le quaturo d'Alexandrie : Justine - Lawrence Durrel - Le Livre de Poche, 1982

Obrigado à Helena Monteiro.



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