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quinta-feira, 18 de agosto de 2005

 
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Coisas esquecidas

Des partis

Il n'est de parti qui n'ait enragé contre la patrie.

Ce sur quoi nul parti ne s'explique.
Chacun a ses ombres particulières — ses réserves —
Ses caves de cadavres et de songes inavouables —
Ses trésors de choses irréfléchies et d'étourderies.
Ce qu'il a oublié dans ses vues, et ce qu'il veut faire oublier.

...Ils retirent pour subsister ce qu'ils promettaient pour exister.
Ils se valent au pouvoir; ils se valent hors du pouvoir.

Il ne faut pas hésiter à faire ce qui détache de vous la moitié de vos partisans et qui triple l'amour du reste.
Ce qui plaît à tel dans son parti politique, c'est le vague de l'idéal. Et à tel autre dans le sien, c'est le précis des objects prochains.

Comme on voit communément des anarchistes dans les partis de l'ordre et des organisateurs dans l'anarchie, je suggère un reclassement. Chacun se classerait dans le parti de ses dons.
Il y a des créateurs, des conservateurs et des destructeurs par tempérament. Chaque individu serait mis dans son véritable parti, qui n'est point celui de ses paroles, ni de ses voeux, mais celui de son être et de ses modes d'agir et de réagir.

Toute politique se fonde sur l'indifférence de la plupart des intéressés, sans laquelle il n'y a point de politique possible.

La politique fut d'abord l'art d'empêcher les gens de se mêler de ce qui les regarde.
A une époque suivante, on y adjoignit l'art de contraindre les gens à décider sur ce qu'ils n'entendent pas.
Ce deuxième principe se combine avec le premier.
Parmi leurs combinaisons, celle-ci: Il y a des secrets d'Etat dans des pays de suffrage universel. Combinaison nécessaire et, en somme, viable; mais qui engendre quelquefois de grands orages, et qui oblige les gouvernements à manoeuvrer sans répit. Le pouvoir est toujours contraint de naviguer contre son principe. Il gouverne au plus près contre le principe, dans la direction du pouvoir absolu.

Tout état social exige des fictions.
Dans les uns, on convient de l'égalité des citoyens. Les autres stipulent et organisent l'inégalité.
Ce sont là des conventions qu'il faut pour commencer le jeu. L'une ou l'autre posée, le jeu commence, qui consiste nécessairement dans une action de sens inverse de la part des individus.
Dans une société d'égaux, l'individu agit contre l'égalité. Dans une société d'inégaux, le plus grand nombre travaille contre l'inégalité.

Le résultat des luttes politiques est de troubler, de falsifier dans les esprits la notion de l'ordre d'importance des questions et de l'ordre d'urgence.
Ce qui est vital est masqué par ce qui est de simple bien-être. Ce qui est d'avenir par l'immédiat. Ce qui est très nécessaire par ce qui est très sensible. Ce qui est profond et lent par ce qui est excitant.
Tout ce qui est de la politique pratique est nécessairement superficiel.

Paul Valéry in Regards sur le monde actuel, 1927.



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