terça-feira, 9 de março de 2010
Au Commencement (III)
Excerto da carta de Anselm Kiefer a Jörg Widmann, Janeiro de 2009, traduzido do alemão por Catherine Métais in Au Commencement.
Cher Jörg
J'ai écouté la musique que tu m'as récemment envoyée. Je suis en Autriche, loin de tout, et les sons sont tombés sur un terrain vierge où ils ont pu produire tout leur effet. Je suis très impressionné par la richesse des sonorités et des couleurs, par l'intensité dramatique des divers morceaux. Me fondant sur ce que j'ai écouté, je tente, avec des mots trop secs, de te laisser imaginer comment je vois notre oeuvre future. Dans la composition que tu m'as envoyée, je pressens un point de départ possible dans les passages suivants: nº 6 et 10 et le début du nº 11 des "Pièces libres pour ensemble", puis les trois premières minutes de "Labyrinthe".
Tu vois, j'ai sélectionné les morceaux les plus doux, les plus "pauvres", les plus retenus, les moins dramatiques, et j'ai laissé de côté ce que tu sais si bien faire: les timbres merveilleux, l'intensité dramatique, les surprises... car notre morceau/oeuvre s'appelle AU COMMENCEMENT. Tout est déjà advenu au commencement, car le commencement est la fin et à la fin se situe le commencement. Au commencement, il n'y a plus que le résiduel. Le commencement bégaie, il bégaie à cause des ruines nombreuses, c'est un élan sans cesse interrompu. Il tente de se reconstituer à partir des restes. À partir des reliquats.
Une couche de cendres recouvrira toute chose, la cendre, produit final et commencement (Phoenix renaissant de ses cendres). Tes superbes sonorités devraient se teinter de gris et devenir plus secrètes. Elles seront bien plus fortes encore en tant que sons contenus, ensevelis, surgissant de l'oubli...
La plupart du temps, je commence un tableau par une profusion de couleurs, je les atténue ensuite, toujours en les recouvrant de nombreuses couches de gris, le gris s'apparente au blanc, qui, chose connue, contient toutes les couleurs. Il est donc au commencement.
J'ai écouté la musique que tu m'as récemment envoyée. Je suis en Autriche, loin de tout, et les sons sont tombés sur un terrain vierge où ils ont pu produire tout leur effet. Je suis très impressionné par la richesse des sonorités et des couleurs, par l'intensité dramatique des divers morceaux. Me fondant sur ce que j'ai écouté, je tente, avec des mots trop secs, de te laisser imaginer comment je vois notre oeuvre future. Dans la composition que tu m'as envoyée, je pressens un point de départ possible dans les passages suivants: nº 6 et 10 et le début du nº 11 des "Pièces libres pour ensemble", puis les trois premières minutes de "Labyrinthe".
Tu vois, j'ai sélectionné les morceaux les plus doux, les plus "pauvres", les plus retenus, les moins dramatiques, et j'ai laissé de côté ce que tu sais si bien faire: les timbres merveilleux, l'intensité dramatique, les surprises... car notre morceau/oeuvre s'appelle AU COMMENCEMENT. Tout est déjà advenu au commencement, car le commencement est la fin et à la fin se situe le commencement. Au commencement, il n'y a plus que le résiduel. Le commencement bégaie, il bégaie à cause des ruines nombreuses, c'est un élan sans cesse interrompu. Il tente de se reconstituer à partir des restes. À partir des reliquats.
Une couche de cendres recouvrira toute chose, la cendre, produit final et commencement (Phoenix renaissant de ses cendres). Tes superbes sonorités devraient se teinter de gris et devenir plus secrètes. Elles seront bien plus fortes encore en tant que sons contenus, ensevelis, surgissant de l'oubli...
La plupart du temps, je commence un tableau par une profusion de couleurs, je les atténue ensuite, toujours en les recouvrant de nombreuses couches de gris, le gris s'apparente au blanc, qui, chose connue, contient toutes les couleurs. Il est donc au commencement.
Excerto da carta de Anselm Kiefer a Jörg Widmann, Janeiro de 2009, traduzido do alemão por Catherine Métais in Au Commencement.